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SAINTEXPRESS, TRAIL ET COURSE SUR ROUTE, 46km, 1’000m dénivelé positif, 1’500m dénivelé négatif
27 Novembre 2021, 23h.

A la fin novembre, j’ai couru la Saintexpress, petite sœur de la mythique Saintélyon. 46 kilomètres et 1’000m de dénivelé positif dans les Monts du Lyonnais, de nuit.

Carte Saintexpress JLC

23h. Je suis au milieu d’une marée humaine qui trépigne d’impatience de passer cette arche de départ et d’enfin en découdre. Des longues minutes à attendre les navettes dans le froid, qui font suite à des mois de préparation physique et psychologique. Les dernières secondes avant le départ sont électriques. Les blagues fusent tout autour. Une façon d’évacuer le stress. Je souris derrière mon masque.

Là, sur cette ligne de départ, le doute s’immisce. Suis-je vraiment prête ? J’ai définitivement allongé les kilomètres et le dénivelé pendant cette prépa, toujours en privilégiant l’endurance fondamentale pour permettre à mon corps d’assimiler. Mais j’aurai aussi pu en faire plus. La grande inconnue réside après le kilomètre 30. Mon corps va-t-il continuer à me porter de la même façon ? Je me ressaisis, ce qui est fait, est fait. Maintenant tu es ici. Je lève la tête. Une mer d’étoile se découvre entre les nuages. Je remercie mentalement les cieux parce qu’ils ne s’ouvrent pas sur nous. Pas encore.

Equipement pour la Saintexpress

23h20. Finalement la marée humaine se met en marche, doucement d’abord, en marchant. Puis je passe finalement cette arche de départ, j’enclenche ma montre et mes jambes. Mon cardio est haut dans les rues enneigées de Sainte Catherine. J’essaye de me concentrer. Respire. Rapidement on marche, la route se réduisant à un sentier dans lequel doivent passer 2.500 coureurs.

Avant le départ de la Saintexpress, grand sourire

Il neige. Je m’émerveille. Je suis tellement reconnaissante que ce soit de la neige plutôt que de la pluie. Mon émerveillement est de courte durée lorsque j’entends des participants devant moi s’exclamer dans la nuit: on arrive sur une section verglacée. Je prends les bords de la route, dans les champs accidentés, la progression est lente mais au moins je n’ai pas l’impression d’être sur une patinoire. Je verrai au moins deux personnes à terre et plusieurs ambulances. Je me répète mon but pour cette course: arriver au bout de ces 46km, 1’000m de dénivelé positif et 1’500 négatif en un seul morceau et en bon état. Doucement mais sûrement.

Je ressens une gêne au niveau de la hanche en descente. L’angoissée en moi élabore 10 scénarios catastrophes. Je regarde ma montre. Seulement 20 kilomètres… Je lève la tête et je vois la lune qui se dévoile derrière un voile nuageux. Instantanément cette vision me relaxe et je respire plus légèrement. Je regarde au loin. La neige et le clair de lune me permettent de voir les lumières des villes et villages plus bas dans la vallée. Il n’y a aucun autre endroit où je préfèrerai être en ce moment. J’ai passé les 3 derniers mois à me préparer pour ce moment précis. Je décide d’en profiter autant que possible. Finalement, je passe le panneau de Soucieu-en-Jarrest, déjà encadré de ses guirlandes lumineuses. Le premier ravitaillement, à mi-chemin exactement.

Ma nuque est fatiguée à force d’avoir la tête baissée dans les single tracks pour que ma frontale illumine là où je pose les pieds. C’est aussi une gymnastique mentale assez importante, il faut être constamment en train de prendre note des obstacles et continuer à courir. A une heure à laquelle je suis normalement dans les bras de Morphée. Au deuxième ravitaillement je décide de m’offrir le luxe de changer mes chaussettes pour une paire que j’ai pris la peine de trimballer sur 32 kilomètres. Je regarde mes pieds, ils sont un peu sensibles à l’avant à force de descendre mais plutôt en forme. Plus que 14 kilomètres les gars. On va le faire ! Un petit thé sucré et ça repart.

Je suis impressionnée par l’organisation et surtout par tous les bénévoles présents aux ravitaillements mais aussi au bord du tracé, à chaque tournant et coin de rue. Leurs encouragements sont vraiment bienvenus. Après le deuxième ravitaillement, les derniers kilomètres s’étirent. Je regarde ma montre plus souvent que nécessaire. On court dans un dédale de rues. Gauche, droite, petites venelles piétonnes, ça descend (mes genoux protestent) avant de remonter sec. Finalement, au détour d’une rue, j’aperçois le musée des Confluences au loin. Ma gorge se noue et les larmes montent. Quel plaisir d’arriver dans cette ville qui m’a accueillie pour plusieurs années d’études.

Soucieu en Jarrest, milieu de la Saintexpress
Ligne d'arrivée de la Saintexpress
Heureuse et fatiguée à la fin de la Saintexpress

Des marches me mènent au niveau des quais de Saône, que nous suivons sur plusieurs centaines de mètres, avant de remonter pour prendre un pont et traverser. Je regarde ma montre, il est presque 6h du matin. J’allonge ma foulée, voilà mon dernier défi, je vais finir avant 6h. Au final mon dernier kilomètre sera le plus rapide. C’est incroyable ce que le corps peut encore donner après avoir passé une nuit blanche et plus de 6h à se déplacer. Je traverse maintenant le Rhône, mon cœur bat tellement fort, parce que je vais plus vite que je n’ai été pendant les 45 kilomètres qui précédent, mais aussi parce que je sais que je vais finir cette course. Je vois la Halle Tony Garnier, le tracé nous fait entrer par le côté pour passer la fameuse arche d’arrivée à l’intérieur.

6h. En une fraction de secondes, je me vois entrer dans la halle et passer cette mythique arche de la Saintélyon. 6h38 de course. Mon émotion est immense. J’aperçois Nevin qui m’attends au bord des barrières. Mes yeux sont remplis de larmes et je peux sentir qu’il est très ému pour moi. La gorge nouée et les larmes aux yeux, je prends un coca au ravitaillement d’arrivée et j’attrape mon tee-shirt de finisher. Je m’empresse de rejoindre mon amoureux, qui m’a accompagnée dans la nuit aux navettes de départ et qui est là au petit matin pour s’assurer que j’ai un changement de vêtements secs et un croissant frais pour célébrer le fait que j’ai fini la Saintexpress.

Ligne d'arrivée de la Saintexpress
Ligne d'arrivée de la Saintexpress